Les Éditions Achab ferment leurs portes. Un communiqué serein de leur fondateur a annoncé cette triste nouvelle. La même sérénité est attendue des destinataires dudit communiqué, exprimant compréhension, gratitude et reconnaissance.
Quinze années d’existence et de contribution éditoriale s’achèvent. Bien que la durée puisse sembler courte, l’impact des Éditions Achab est indéniablement significatif. Cet impact ne se mesure pas seulement en termes quantitatifs, mais surtout qualitatifs des livres introduits sur le marché et des débats qu’ils ont suscités. Le blog des Éditions, une petite vitrine, offre également des informations, des analyses et des textes téléchargeables.
Achab. Ramdane Achab. La prestigieuse édition qui porte son nom, un nom facile à retenir. Militant de la première heure, volontaire pour enseigner informellement et semi-clandestinement le tamazight en France et en Algérie, généreux et sincère dans ses actions militantes, berbérisant reconnu, il complète son engagement militant en créant une maison d’édition de livres « qui accorde une place et une attention particulières au domaine berbère, tout en restant ouverte à tous les autres domaines ».
Depuis sa création à la fin de la première décennie des années 2000, la maison d’édition Achab a publié plus de 80 livres. Son catalogue est en lui-même un grenier d’informations concernant généralement la culture amazighe, en particulier la littérature d’expression amazighe, notamment kabyle.
Au-delà des données chiffrées, qui, à travers les détails éditoriaux, révèlent l’identité de cette entreprise, son catalogue, à l’image d’autres maisons éditoriales de la même période telles que les Éditions Tira de Brahim Tazghart, les Éditions Tamagit d’Ahmed Nekkar, les Éditions Imtidad de Firas Eldjahmani, et les Éditions l’Odyssée d’Ali Oubellil, témoigne de l’institutionnalisation du livre en tamazight.
Un examen rapide du catalogue révèle que plus de la moitié des publications des Éditions Achab concernent la littérature amazighe : romans, poésie, contes, nouvelles, théâtre, et collectes de traditions orales. Les autres détails démontrent également une ouverture disciplinaire (littérature, linguistique, dictionnaires, société, histoire, etc.) et une couverture sociolinguistique étendue (littérature en français, littérature en tamazight du Maroc, littérature en chaoui).
D’autres détails, plus qualitatifs, prouvent que les Éditions Achab sont une vitrine exceptionnelle de l’état du champ littéraire. Elles ont encadré la littérature, notamment kabyle, dans une voie de renouvellement (Akli Kebaili, Mohia, et bien d’autres) sans pour autant exclure la littérature traditionnelle (Benamara, Zellal, R. At Mensur, Genevoix, Lasheb, Aknine, etc.). Elles illustrent également la complexité de ce champ dans ses rapports avec les langues d’expression, comme en témoigne la complémentarité entre la littérature en tamazight et son accompagnement critique en français.
Un autre détail important : les Éditions Achab ont continuellement encouragé les jeunes auteurs au cours de leurs quinze années d’activité. Des auteur(e)s tel(le)s que Ben Sidhoum, Mourad Irnaten, Tilyuna Su, Zohra Aoudia, Makhlouf Kaci, Katia Touat, Kaysa Khalifi, Mourad Bakir en sont les témoins. Les auteurs plus expérimentés ont également trouvé chez Ramdane Achab une oreille attentive et un soutien éditorial, tels que Aomer Oulamara, Ramdane At Mensur, Djamel Benaouf, Ali Akache, Tahar Ould Amar, Ramdane Lasheb, Hadjira Oubachir…et plusieurs autres. Leurs œuvres continueront à porter la mention de cet éditeur que l’histoire culturelle et littéraire retiendra.
L’aventure des Éditions Achab se termine en 2023. Un grand merci à Ramdane Achab. Notre reconnaissance et gratitude pour le plaisir procuré. Longue vie et prospérité aux autres éditeurs.
Mohand Akli Salhi