Toujours dans les écarts, revoilà l’ineptie à l’assaut. Après Koukou, le SLAO et la Librairie Cheikh, cette fois, ce sont les Éditions Frantz Fanon qui sont sommées, sur fond de « sous scellés », de se mettre au garde-à-vous et de rentrer dans les rangs convenus par l’énigmatique Big Brother.
Quelle mouche a piqué Frantz Fanon ? Pourquoi colporte-t-il « un discours haineux » ? Ne sait-il pas que « L’Algérie juive » porte atteinte « à la sécurité et à l’ordre public ainsi qu’à l’identité nationale » ? Ignorait-il qu’immanquablement il subirait les soubresauts idéologiques ?
De toute manière, et n’en déplaise à la résilience livresque, comme un vulgaire pot de yaourt périmé, L’Algérie juive sera gommée des étagères de librairie par les contrôleurs des prix de la direction du commerce. Qui dit mieux ?
Paru en août 2023, L’Algérie juive de l’universitaire franco-algérienne Hédia Bensahli traite du fragment judaïque de l’Algérie depuis l’Antiquité jusqu’à l’indépendance. A priori, pas de quoi monter sur ses grands chevaux de gardien du temple DZ. En plus, le livre a circulé le plus normalement du monde jusqu’au mois d’octobre. Il a même été question, pour Frantz Fanon, d’inviter l’auteure pour aller à la rencontre des lecteurs dans des librairies algériennes. Quoi de plus normal que de se réunir autour d’un livre et d’en débattre ?
Mais c’était compter sans ces douktour ès-nationalisme et autres gardiens du temple arabo-islamiste qui, l’atmosphère géopolitique ambiante aidant, montrent du doigt L’Algérie juive, crient à la trahison et dénoncent le déboulonnement des sacro-saints thawabit. Ils ne se limitent pas à se ruer sur les réseaux sociaux, art dans lequel ils excellent : ils interpellent « l’Autorité ».
Jusque-là, rien d’extraordinaire. C’est plutôt le contraire qui le serait. En fait, l’extraordinaire, qui hélas se banalise, c’est lorsque l’Autorité tend l’oreille à l’ineptie et suit le doigt du douktour ès-nationalisme. Suivons le doigt, laissons le livre livré à lui-même ! Et la culture de DZ Hurra dimuqratiya ?
Autant en emporte le… ventre.
Tahar Ould Amar