Librairie sous scellés, éditeur et romanciers non grata, statue déboulonnée, salons du livre et cafés littéraires soumis à l’appréciation d’une idéologie tapie dans l’ombre et non ouvertement assumée… et « pfiouuu ! », dirait Mohia.
Face à cette série d’interdits officieusement officiels et de cabale inculte contre le livre, les réactions, plutôt timides, ont trouvé écho essentiellement sur les réseaux sociaux, faute de médias trop occupés à comptabiliser et chronométrer les réclames publicitaires.
Ait-Larbi Arezki, gérant des Éditions Koukou, était le premier à réagir au lendemain de son « exclusion du Salon du Livre Amazigh de Ouacif », devant se tenir du 03 au 06 octobre dernier : « Le groupuscule extrémiste qui a pris le ministère de la Culture en otage a encore frappé. Tidjani Tama, président de la Commission de censure et directeur central du Livre au ministère de la Culture et des Arts, vient d’exercer un odieux chantage sur les organisateurs du Salon du Livre amazigh, prévu du 03 au 06 octobre à Ath Ouacif (wilaya de Tizi-Ouzou). Avant de délivrer l’autorisation préalable à la tenue du Salon, il a exigé l’exclusion des Éditions Koukou de cette manifestation, sans justification ni motif légal. Sollicité pour donner un caractère officiel à cette injonction verbale, le censeur en chef a refusé de délivrer un document écrit qui engagerait sa responsabilité… »
À souligner que les Éditions Koukou n’en sont pas à leur première éviction des activités culturelles. Koukou sera indésirable au SILA, au Salon du livre de Béjaïa et celui de Tizi-Ouzou, tenu tout récemment. L’élan de solidarité avec l’éditeur indésirable ne s’est pas fait attendre. Beaucoup d’auteurs ont exprimé leur soutien à Koukou en décidant de boycotter les activités livresques.
Cette réplique citoyenne qui consiste à boycotter les activités culturelles ne semble pas faire l’unanimité. Un autre son de cloche estime que les boycotter, c’est faire le jeu du censeur qui trouverait en les boycotteurs des alliés inestimables, car, au final, le but recherché est « l’instauration d’un désert culturel ».
Ne se préoccupant pas des états d’âme des uns et des autres, le « censeur » monte d’un cran : il met sous scellés la librairie Chikh de Tizi Ouzou. Là aussi, déferlante de colère sur les réseaux sociaux, désormais unique espace citoyen de liberté.
Encouragé par l’absence de l’autorité républicaine à même de le rappeler à l’ordre, « l’interdit » décide d’exclure des fragments de l’Histoire qu’il refuse d’assumer. La statue d’Aksil érigée à Bouhmama, dans la wilaya de Khenchela, est déboulonnée 24 h après son installation. Dégainer plus vite que ça…
Jusque-là, aucune réaction de l’institution responsable. C’est à croire qu’il n’y a pas de commandant à bord du « bateau culture ».
Tahar Ould Amar